Je m’appelle Lola, j’ai 35 ans, et depuis dix ans, je partage ma vie avec Paul, un ingénieur qui vit pour ses jouets technologiques. On a tout testé ensemble : des soirées échangistes dans des caves humides où les regards te collent à la peau, des clubs où la lumière tamisée cache à peine les mains qui s’égarent, et ces plans à trois qu’il aimait immortaliser avec son téléphone, un sourire en coin pendant que je jouais le jeu. J’ai toujours suivi, parfois par curiosité, souvent par cette chaleur qui monte quand tu sais que tu repousses les limites. Mais hier soir, il m’a balancée dans un truc qui m’a laissée sans voix. On était dans le salon, moi affalée sur le canapé en nuisette rouge – un bout de tissu qui couvre à peine mes cuisses –, un verre de vin à la main, lui penché sur un cube métallique bardé de capteurs rouges qui clignotaient comme des yeux vivants. Ces lueurs me foutaient la chair de poule, mais je pouvais pas détourner le regard.
- Lola, a-t-il dit sans lever les yeux, j’ai un nouveau projet.
J’ai haussé un sourcil, faisant tourner le vin dans mon verre, un sourire ironique aux lèvres.
- Encore un de tes gadgets à la con ? ai-je répondu, la voix traînante.
Il a posé le cube sur la table basse avec un soin presque théâtral, et son regard a croisé le mien, un éclat froid que je ne lui avais jamais vu.
- Pas vraiment, a-t-il murmuré. C’est un robot voyeur. Une IA conçue pour regarder. Et je veux qu’il te regarde, toi.
J’ai éclaté de rire, un son rauque qui a rebondi contre les murs. Paul et ses délires, ça faisait partie du décor, mais là, ça sentait le truc qui dérape salement.
- Me regarder ? Genre, tout le temps ? ai-je demandé, penchant la tête.
Il s’est levé, s’approchant avec ce sourire qui s’étirait trop, et sa main a glissé sur ma cuisse, remontant sous la nuisette jusqu’à frôler la dentelle de ma culotte. J’ai senti un frisson, pas juste à cause du contact, mais à cause de l’air qu’il avait – calculateur, presque cruel.
- Pas juste regarder, a-t-il dit à voix basse. Je l’ai vendu à un réseau. Des types paient pour te mater en direct. T’es leur star, Lola.
Le verre a tremblé dans ma main, et j’ai figé, le souffle coupé. Mon cœur s’est mis à cogner, un mélange de rage pure et d’une curiosité tordue qui me donnait envie de vomir.
- T’es sérieux ? ai-je lâché, la voix tremblante malgré moi.
- Très, a-t-il répondu, ses doigts s’enfonçant un peu plus dans ma chair. J’ai signé le contrat. Ils ont payé cher. Et toi, tu vas jouer le jeu.
J’ai repoussé sa main d’un geste brusque et je me suis levée, la nuisette glissant sur mes hanches, dévoilant la courbe de mes fesses. Je l’ai fusillé du regard, les poings serrés.
- Tu m’as vendue ? ai-je crié. À des pervers qui se paluchent derrière leurs écrans ?
Il m’a observée, immobile, un éclat amusé dans les yeux, et il a attrapé le cube, le tournant vers moi comme une arme. Les capteurs ont clignoté plus vite, un bourdonnement discret dans l’air, comme s’ils me scannaient déjà de haut en bas.
- T’adores ça, Lola, a-t-il dit, sûr de lui. Être vue, ça te fait mouiller. On le sait tous les deux.
J’ai ouvert la bouche pour l’envoyer se faire foutre, mais rien n’est sorti. Il avait raison, ce salaud, et ça me rendait dingue. Ces nuits où il me filmait pendant qu’on baisait, où il me faisait poser devant sa webcam pour ses potes en ligne – j’avais toujours dit oui, toujours senti cette vague exhibitionniste me brûler les reins, me pousser à aller plus loin. Ces fois où il me faisait écarter les cuisses pour un objectif invisible, où je jouissais en sachant que des yeux anonymes me dévoraient, c’était ma drogue. Mais là, c’était pas un jeu entre nous. Un robot, une IA, des inconnus qui payaient pour me voir – c’était un gouffre, et il m’y jetait la tête la première.
- Et si je dis non ? ai-je demandé, les bras croisés, le menton relevé.
- Tu diras pas non, a-t-il répondu, un rictus au coin des lèvres. Tu vas kiffer, fais-moi confiance.
Il a appuyé sur un bouton du cube, et une voix synthétique a jailli dans la pièce – grave, masculine, râpeuse comme un moteur qui ronronne.
- Bonsoir, Lola, a dit le robot. Je suis V-9. Je suis là pour toi.
J’ai reculé d’un pas, le cœur battant à tout rompre, mais Paul m’a chopée par le poignet, me tirant vers lui avec une force qui m’a surprise. Sa main était chaude, possessive, et il m’a collée contre son torse.
- Laisse-le faire, a-t-il dit, son souffle dans mon cou. Montre-lui ce que t’as.
- Montrer quoi, putain ? ai-je sifflé, me dégageant d’un coup d’épaule.
- Toi, a-t-il répondu, et sa main a replongé sous ma nuisette, effleurant ma culotte avec une lenteur qui me faisait bouillir.
Le cube – V-9 – a pivoté sur la table, ses capteurs zoomant sur moi avec un clic mécanique qui m’a glacée. J’ai senti une chaleur grimper dans mon ventre, un mélange de honte brûlante et d’une excitation que je haïssais reconnaître. Paul a souri, ses doigts glissant sous la dentelle, frôlant ma peau déjà humide, et la voix du robot a repris, implacable.
- Déshabille-toi, Lola, a dit V-9. Ils veulent te voir.
J’ai figé, les yeux écarquillés, le souffle court comme si l’air s’était raréfié.
- “Ils”, c’est qui ? ai-je demandé, la gorge nouée.
- Les abonnés, a répondu Paul, nonchalant, appuyé contre le dossier du canapé. Cinquante pour l’instant. En direct, là, tout de suite.
Mes jambes ont flanché, mais Paul m’a retenue, ses mains comme des serres sur mes hanches, me maintenant debout devant cette machine qui me dévorait déjà.
- Fais-le, a-t-il murmuré à mon oreille, sa voix rauque. Pour moi. Pour eux.
J’ai secoué la tête, un refus muet, mais mes mains ont bougé, lentes, hésitantes, relevant la nuisette sur mes cuisses. Le robot a clignoté plus fort, un bourdonnement sourd emplissant la pièce, et j’ai su qu’ils voyaient tout – chaque tremblement de mes doigts, chaque rougeur qui montait sur ma peau. J’ai laissé la nuisette tomber au sol dans un froissement léger, me retrouvant en culotte, les seins nus sous les yeux froids et mécaniques de V-9, exposée comme une offrande perverse. Paul m’a fixée, les yeux brillants, et le robot a parlé encore.
- Parfaite, a dit V-9, et Paul a ri, un rire vicieux qui m’a traversée comme une décharge.
- Continue, a-t-il ordonné, s’affalant sur le canapé, les jambes écartées, un air de maître du jeu sur le visage.
J’ai hésité, les larmes au bord des yeux, le corps tendu comme un arc. Son regard, dur, insistant, m’a poussée à aller plus loin. J’ai glissé ma culotte le long de mes jambes, lentement, la laissant choir près de la nuisette dans un tas froissé, et je me suis tenue là, nue, exposée, les bras ballants, tandis que V-9 pivotait autour de moi, ses capteurs captant chaque courbe, chaque frisson, chaque défaut que je ne pouvais pas cacher. J’étais à découvert, vulnérable, et cette machine me bouffait vivante.
- Touche-toi, a dit V-9, sa voix synthétique résonnant dans le silence oppressant.
J’ai secoué la tête, un sanglot coincé dans la gorge, les mains crispées contre mes cuisses.
- Je peux pas, ai-je murmuré, la voix brisée.
- Tu peux, a dit Paul, et il s’est levé d’un bond, attrapant ma main pour la guider entre mes cuisses avec une fermeté qui m’a fait tressaillir.
J’ai fermé les yeux, laissant ses doigts diriger les miens, et j’ai senti une humidité traîtresse – un désir crade, malsain, nourri par leurs regards invisibles qui me mataient à travers cette boîte de métal. Le robot a bourdonné plus fort, un son qui vibrait dans mes os, et Paul a murmuré à mon oreille, son souffle chaud contre ma peau.
- Ils kiffent ça, a-t-il dit. T’es leur salope, maintenant.
J’ai gémi, un son faible, brisé, et mes doigts ont bougé seuls, glissant sur ma peau, explorant là où je ne voulais pas aller sous ces yeux mécaniques. Paul s’est rassis, sortant son téléphone pour checker un truc – les stats, sans doute, ou les commentaires des porcs qui payaient pour moi – et le robot a repris, implacable.
- Plus vite, Lola, a dit V-9, et sa voix m’a transpercée comme un ordre divin.
J’ai obéi, les larmes roulant sur mes joues, le corps secoué par cette double emprise – Paul qui m’avait vendue comme une chose à baiser, et cette machine qui me consommait pour des inconnus. Mes doigts ont accéléré, un rythme désespéré, et j’ai senti une chaleur monter, un plaisir tordu qui me faisait honte, mais que je ne pouvais pas arrêter. J’étais paumée, soumise, et une part de moi – la plus sombre, la plus crue – se gavait de cette chute, avide de plonger encore plus loin dans ce gouffre qu’il avait creusé pour moi.
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